EMMA PICARD

❤️❤️❤️❤️
The Algerian nightmare
Théâtre Transversal - 17h50
Quand je suis entré dans la salle, j’avais un peu peur. Entre la fatigue accumulée de cette première semaine de rush au OFF, la chaleur étouffante et le fait que ce soit un seul en scène, je craignais de sombrer dans la somnolence et de passer complètement à côté. Bref, je m’attendais à tout… sauf à me prendre une claque.
Dès son entrée d’Emma Picard, elle a capté mon attention. J’ai été tout de suite scotché par le vide de son regard et tout le poids de l’épuisement et de la culpabilité qui semblait reposer sur ses épaules. Puis, elle a parlé… et ma fascination s’est mise en marche…
La pièce dévoile une face sombre de l’histoire de France, de celles qu’on préfère laisser sous le tapis. On découvre cette paysanne alsacienne, veuve, mère de quatre fils, en 1860. Le gouvernement français lui promet l’eldorado en Algérie, des terres et une vie meilleure. Mais ce rêve de soleil va vite tourner au cauchemar…
EMMA PICARD, c’est avant tout le portrait bouleversant d’une femme prête à tout pour ses enfants. Elle raconte son destin brisé, sa désillusion profonde, elle qui pensait trouver le bonheur au bout de l’exil.
Marie Moriette est magistrale. D’une sobriété désarmante, elle incarne cette femme avec une force rare. Sans aucun pathos, elle vient vous attraper les tripes et ressert son étreinte au fur et à mesure de son récit. Elle nous raconte son récit avec une intensité folle, possédée par son personnage. À tel point qu’au moment des applaudissements, elle semble encore prisonnière de l’émotion. Comme nous…
La mise en scène est minimaliste. Aucun artifice, juste une chaise auprès de laquelle se trouve le lit où se repose son fils, une fenêtre en fond de scène et un subtil jeu de lumières. C’est tout. Et c’est amplement suffisant. Le reste, c’est le talent brut de la comédienne, sa colère contenue, son désespoir, son rejet d’un Dieu qui semble l’avoir abandonnée. Elle parvient à nous faire ressentir la chaleur accablante, la dureté du climat, les fléaux qui s’abattent sur elle et les siens.
Je ne m’attendais pas à vivre ça.
À être bouleversé de cette façon.
À recevoir ce récit comme un rouleau compresseur.
Et pourtant…


